Comment préserver sa capacité d’investissement en temps de crise
L’inflation va-t-elle repartir ? La fiscalité des sociétés va-t-elle s’alourdir ? Et que penser de la dynamique de la consommation ? En période d’incertitude comme celle que nous vivons depuis plusieurs mois, les chefs d’entreprise doivent garder les yeux rivés sur leur trésorerie et leur capacité de financement à court terme tout en préparant l’avenir. Comment limiter les immobilisations tout en développant son activité ? Peut-on investir tout en minimisant les risques ? Tour d’horizon des solutions à leur disposition.
Dans un environnement compliqué, nombre d’entreprises voient leur rentabilité diminuer, ce qui les contraint à adopter un mode de gestion défensif. Plutôt que de continuer à investir, elles préfèrent réduire la voilure pour se concentrer sur la gestion du court terme. D’après le baromètre trimestriel publié en novembre 2024 par Bpifrance Le Lab Rexecode « Trésorerie, investissement et croissance des PME/TPE », 56 % des dirigeants de PME/TPE estiment que le climat d’incertitude en termes de politique économique exerce un impact négatif fort sur leur activité. Ils sont respectivement 45 et 35 % à avoir reporté ou envisagé de reporter leurs projets d’investissement et/ou d’embauches. 21 et 19 % d’entre eux envisagent de les annuler. Seule une minorité envisage de les maintenir.
Continuer de développer son activité sans investir
Les chefs d’entreprise peuvent activer plusieurs leviers pour développer leur activité, sans investir, en privilégiant le recours à l’externalisation, la location ou le partage. Cela leur permet de maintenir de la trésorerie disponible pour saisir des opportunités le moment venu, être capables d’investir à bon escient lorsque l’occasion se présentera.
Recourir à la sous-traitance
Plutôt que d’investir dans un nouvel équipement, les TPE/PME peuvent faire appel à des entreprises spécialisées pour leur déléguer la production de certains produits ou la réalisation de prestations. En s’appuyant sur des partenaires sérieux et rigoureux, elles pourront honorer leurs commandes sans avoir à mobiliser des ressources internes en matériel, compétences ou technologies. Si cette organisation facilite le maintien voire l’augmentation du chiffre d’affaires, elle engendre en revanche une réduction des marges du donneur d’ordre qui peut impacter sa rentabilité. Le choix du sous-traitant est donc stratégique : il faut veiller à ce qu’il produise des produits de qualité et à ne pas devenir dépendant du sous-traitant.
Faire appel à du personnel extérieur
Le recrutement de personnels en CDI peut être considéré comme un investissement de long terme. En période d’incertitude, le recours à l’intérim, c’est-à-dire l’embauche d’une personne sous contrat de travail temporaire avec une entreprise de travail temporaire, permet de disposer de ressources humaines pour une durée variable, ajustée aux besoins précis du moment. Le portage salarial, moins répandu, est une piste à étudier. Il s’agit d’une relation contractuelle tripartite entre le salarié « porté », qui conclut un contrat de travail avec une entreprise de portage salarial, et effectue une prestation pour le compte d'une entreprise cliente. Cette dernière peut faire appel au portage salarial pour des tâches occasionnelles ne relevant pas de son activité normale et permanente ou pour une prestation ponctuelle nécessitant une expertise qu’elle n’a pas. Pour certaines missions, les entreprises peuvent aussi faire appel à des freelance, c’est-à-dire des travailleurs indépendants experts dans leur domaine.
Ces solutions ont l’avantage d’apporter de la souplesse à l’employeur car elles permettent de disposer des ressources nécessaires à un instant T pour soutenir le développement de l’activité, sans augmenter la masse salariale.
Actionner le crédit-bail ou la location financière
Le crédit-bail est une formule de location achat réservé aux entreprises, aussi appelée leasing. Cette opération financière consiste à louer des biens d’équipement (véhicules, outillage…) ou immobiliers à un établissement de crédit avec possibilité de devenir propriétaire du bien, pendant la période de location ou le plus souvent à échéance à un prix fixé au départ par contrat, majoré des intérêts et frais.
La location financière est assez proche : elle permet à l’entreprise d’utiliser un bien en location, mais sans option d’achat.
Ces deux solutions offrent à l’entreprise la possibilité de disposer des biens dont elle a besoin pour fonctionner sans augmenter son poste d’immobilisation à court terme. Toutefois, elles peuvent s’avérer coûteuses en cas de taux d’intérêt élevés.
Mutualiser des dépenses
a mutualisation d’équipements, de locaux ou de compétences avec d’autres entreprises est aussi un levier d’économies. Cette approche collaborative permet de disposer des ressources nécessaires à son activité sans en supporter les coûts en totalité et d’être plus à même de s’adapter aux fluctuations économiques. De plus, la mutualisation peut être l’opportunité, pour les TPE et PME, d’accéder à des solutions de pointe, innovantes, ou à des expertises, qu’elles ne pourraient pas « s’offrir » seules.
Investir en réduisant les risques
Les chefs d’entreprise qui souhaitent poursuivre leurs investissements même en période d’incertitude pour accompagner leur croissance et/ou anticiper la sortie de crise ont tout intérêt à minimiser les risques pour faire face à un retournement de leur activité.
Acheter en cession-bail
La cession-bail, ou leaseback, est une stratégie financière qui permet de libérer du capital immobilisé dans les actifs : l’entreprise vend un bien à un organisme financier puis le lui loue. Cela revient à rendre liquide une immobilisation – et donc à renforcer sa trésorerie ainsi que sa capacité d’endettement –, sans pour autant en perdre son usage.
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Renouveler son parc de matériel à moindres frais
Vendre du matériel « usagé » ou peu utilisé, au profit d’équipements plus modernes et adaptés aux besoins réels de l’entreprise est un moyen d’investir à moindre coût. À l’inverse, certains équipements peuvent être achetés d’occasion, donc moins chers que des neufs, lorsque cela n’entrave pas leur performance. Les achats aux enchères sont également un moyen de minimiser les dépenses d’investissement.
Racheter une entreprise à la barre du tribunal
Cette logique d’acquisition à moindre coût peut s’appliquer à la reprise de tout ou partie d’une entreprise en redressement ou liquidation judiciaire à la barre du tribunal de commerce. Cette opération peut s’avérer moins coûteuse que de créer une société de toute pièce. L’acquéreur peut en effet récupérer une clientèle, un bail commercial, du matériel et du stock par exemple tout en réduisant son investissement de départ.
Gager son stock
Cette opération consiste à transformer son stock en ligne de financement auprès d’un organisme bancaire. La valeur du stock est estimée pour définir le montant du prêt à court ou moyen terme. Ce crédit peut prendre la forme d’un découvert, d’un billet de trésorerie, d’un escompte, d’une cession Dailly… dans un objectif commun : obtenir des liquidités. À noter qu’il existe deux formes de gage : avec dépossession, et dans ce cas le garant devient le propriétaire du stock gagé, ou sans dépossession, lorsque l’entreprise reste la détentrice de son stock.
Une autre forme de garantie assez proche du gage est le nantissement, réservé à des biens incorporels (comme des créances). Le plus courant est le nantissement bancaire, permettant d’obtenir un financement ou un crédit bancaire en utilisant des comptes bancaires ou des titres comme garantie.
L’affacturage, une solution de financement adaptée à toutes les situations
Que l’entreprise souhaite investir ou non, l’affacturage est une solution de financement alternative au prêt bancaire qui permet de renforcer la trésorerie et par conséquent de préserver la capacité de financement. Avec cette solution, l'entreprise a un accès immédiat aux liquidités dues par ses clients, le factor (ou affactureur) se chargeant d’avancer ces fonds et de recouvrer les créances à échéance. L’affacturage permet donc de gagner du temps sur le recouvrement des factures et de se prémunir des impayés. Autant de liquidités qui peuvent servir au financement des dépenses courantes de l’entreprise, à investir ou à gagner la confiance des établissements bancaires pour obtenir plus facilement un crédit.